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PASSION GENEALOGIE, HISTOIRES de NORMANDIE et d'AILLEURS - Page 36

  • « Pain de Mars » et pâte d'amande

    Le massepain dont le nom provient du latin « martius panis » soit « pain de Mars » est une confiserie traditionnelle confectionnée à base d'amandes mondées et finement moulues mélangées à du blanc d'œuf et du sucre dans une proportion respective de 2/3-1/3. Lorsque ces ingrédients sont présents en même proportion, on obtient de la pâte d'amande.

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    Utilisée depuis l'Antiquité, les Romains appelaient l'amande « la noix grecque ». Née sur les terres ensoleillées des rives de la Méditerranée, dès le Moyen-âge, on va la piler ou plutôt la broyer « à grant foison ». Avec la pâte obtenue, on confectionner des pâtisseries comme le massepain ou les macarons, mais aussi de l'huile et une liqueur un peu oubliée aujourd'hui, le sirop d'orgeat.

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    Selon le « Robert historique » le mot « massepain » serait à rattacher à l'italien « marzapane” qui désignait au XIVe siècle une mesure de capacité de la côte sud de l'Asie Mineure. L'une des premières références au massepain a été découverte dans les registres de la ville allemande de Lübeck de l'année 1530 où des apothicaires le commercialisait pour les propriétés médicinales de la pâte d'amande réputée soulager le cœur, les douleurs pectorales et les maux de tête.

    Avant que le sucre n’existe en Europe, les amandes étaient mêlées à du miel et parfumées aux épices ou à l’eau de rose. Produit rare et coûteux, jusqu’au XVIIIe siècle, il se vulgarisa grâce à l’importation du sucre de canne produit dans les colonies et à l’exploitation de la betterave sucrière.

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    L'astrologue et auteur Nostradamus (1503-1566) nous a laissé la recette du Massepain dans son « Traité des Fardements et Confitures (1555) ». En voici un extrait (orthographe modernisée).*

    « Prenez des amandes plumées bien nettes (émondées), une livre, faites-les piler fort dans un mortier de marbre, avec demi-livre de sucre de Madère & quand tout sera bien pilé ensemble, vous yu mettrez un peu de l'eau de rose, en les pilant, pour cause qu'elles ne rendent pas d'huile & quand elles seront très bien pilées, vous en ferez de petits tourteaux, ou de petites tartelettes toutes rondes étendues dessus des oublies(...) puis les faire cuire au four. Et quand elles seront demi-cuites au four, vous aurez (prendrez) du sucre en poudre & les pâtrerez (pétrirez) avec blancs d’œufs, peu du suc (jus) des oranges, & ferez qu'il sera fort liquide & quand la tarte sera presque du tout cuite, vous la sortirez du four & avec une plume, lui mettrez pardessus de ce sucre liquéfié & puis retournerez la tarte dans le four tant seulement (simplement) pour prendre couleur & quand sera cuite, la trouverez avoir un goût délectable & savoureux... »

     

     

    * Recette publiée dans la revue « Patrimoine Normand » n°93 de 2015.

  • Un bien curieux service rendu à la Couronne de France...

    Elle devait son surnom à son œil de verre qu'elle cachait dans la journée, à l'image des corsaires, sous un bandeau de tissu. Saint-Simon (1675-1755) la décrivait comme une « créature de beaucoup d'esprit, d'une grande intrigue, fort audacieuse, qui eut le grappin sur la reine-mère, et qui était plus que galante… » Ainsi, bien que borgne mais aussi laide, bossue et avare, Cateau la Borgnesse née Catherine Henriette Bellier  (1614-1689 ) aurait eu jusqu'à sa mort, à l'âge de 75 ans, un nombre considérable d'amants...

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    Un des macarons de la cour d'honneur de l'hôtel de Beauvais - Peut-être le portrait de Catherine Bellier.

    Elle avait épousé Pierre Beauvais, Marchand de rubans et c'est grâce à lui qu'elle fit son entrée au Louvre où elle fut rapidement remarquée par Anne d'Autriche (1601-1666). Très proche de la reine à laquelle, en qualité de première femme de chambre, elle administrait notamment clystères, lavements et autres traitements médicaux usuels à l'époque, elle avait déjà quarante ans quand celle-ci lui demanda de déniaiser son fils, le futur Louis XIV (1638-1715) alors âgé d'à peine 16 ans, qui tardait d'après elle à montrer de l'appétit pour le sexe opposé.

    Apparemment, elle aurait su y faire car, toujours selon Monsieur de Saint-Simon, le jeune prince, ayant prit goût à la chose, prit du plaisir à rejoindre fréquemment sa pourtant assez repoussante maîtresse.

    Pour ce royal dépucelage, une pension de 2000 livres lui fut versée ainsi que la jouissance d'un beau terrain dans le quartier parisien du Marais. Elle s'y fit construire un véritable palace, l'Hôtel de Beauvais, qui abrite aujourd'hui la Cour administrative d'appel de Paris.

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    Gravure de Jean Marot montrant la façade d'origine de l'hôtel (1660) et son registre décoratif

    Et c'est du balcon de la nouvelle demeure de sa Dame de compagnie que la reine-mère entourée du Cardinal Mazarin (1602-1661) et de Henri de La Tour d’Auvergne, vicomte de Turenne 1611-1675) vont assister l'après-midi du 26 août 1660 à l’entrée dans la capitale du jeune roi venu présenté son épouse Marie Thérèse (1638-1683) aux parisiens. Françoise d’Aubigné qui s’y trouvait, vit pour la première fois de sa vie son futur mari et souverain. Le porche est surmonté des armes de France en souvenir de la journée du 26 août 1660.

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    La magnifique entrée du Roy et de la Royne dans leur bonne ville de Paris le 26 août 1660

     [estampe] Ladame, Gabriel (1613?-1682?) -Graveur

    Quant à son mari, en récompense de sa complaisance, en plus du titre de cocu, il reçut celui de baron ! Devenue veuve en 1674, elle se retrouva submergée de dettes. Contrainte par son âge avancé de s'éloigner de la vie de cour, elle se retira à Arrou (Eure-et-Loir). Elle acheva misérablement sa vie, ruinée par le jeu et quelques gigolos.

  • Comme une injure au talent...

    Figure de proue du mouvement impressionniste, le rédacteur de l'acte de décès de cette très grande dame de la peinture qui suscitait l'admiration et le respect de ses pairs, efface en seulement deux mots son immense carrière artistique. Un « sans profession »  qui sonne comme un véritable outrage !

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    Acte de décès – Archives de la Ville de Paris – V4E10016 – acte n°306 – vue 12/31

    Quand Berthe Morisot (1841-1895) et sa sœur ont commencé à peindre, le mépris pour les femmes peintres atteignait des sommets ! Pour preuve, ce qu'écrivait Edouard Manet (1832-1883), son futur beau-frère,  à Fantin-Latour (1836-1904) : « Je suis de votre avis, les demoiselles Morisot sont charmantes, c'est fâcheux qu'elles ne soient pas des hommes. Cependant, elles pourraient, comme femmes, servir la cause de la peinture en épousant chacune un académicien et en mettant la discorde dans le camp de ces gâteux. »

    Mais Berthe Morisot est une « rebelle » Avec sa volonté de rupture avec les traditions, la transcendance de ses modèles et surtout son immense talent, elle va devenir un des chefs de file de la nouvelle tendance impressionniste. Il faut dire qu'elle excelle dans tout : peinture, aquarelle, pastel et même la gravure.

    Son goût pour l'art pictural fut cultivé par sa mère, Marie-Joséphine-Cornélie Thomas, elle-même petite-nièce du peintre Jean Honoré Fragonard (1732-1806). Pour faire plaisir à son mari qui avait étudié l'architecture et qui était amateur d'art, et comme à cette époque l'École des beaux-arts n'était pas ouverte aux femmes, elle va offrir à deux de ses filles, Berthe et Edma (1839-1921), des leçons de peinture qui vont les mener à exposer pour la première fois leurs œuvre en 1864.

    Tournant le dos très vite à l'enseignement académique, Berthe Morisot fonde avec Claude Monet (1840-1926), Auguste Renoir (1841-1919), Alfred Sisley (1839-1899), Camille Pissarro (1830-1903) et Edgar Degas (1834-1917) le groupe d'avant-garde les « Artistes Anonymes Associés » lequel deviendra la « Société anonyme des artistes peintres, sculpteurs et graveurs » regroupant des impressionnistes. Au printemps de 1874, lors de leur Première exposition dans les Salons Nadar du boulevard parisien des Capucines, sur 29 exposants, elle sera la seule femme ! Elle y présentera néanmoins plusieurs tableaux, dont « Cache-cache ». 

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    Berthe Morisot. Cache-cache (1873) - Huile sur toile, 45 × 55 cm

    C'est l'été de la même année qu'en Normandie, à Fécamp (Seine-Maritime) où elle passe des vacances en famille, qu'elle va se lier à Eugène Manet (1833-1892), le frère puîné d'Édouard Manet. Il a quarante et un ans et aime peindre à ses côtés tout en la courtisant. Le 22 décembre suivant, elle l'épouse à la Mairie puis à l'église de Notre-Dame-de-Grâce de Passy. Leur fille Julie naîtra en 1878.

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    Eugène Manet, Berthe Morisot et leur fille Julie à Bougival en 1880

    Eugène Manet décédera à Paris le 13 avril 1892. Elle le rejoindra un peu moins de trois ans plus tard, le 2 mars 1895. Elle est enterrée dans le caveau des Manet au cimetière de Passy. Sur sa tombe est simplement gravé : « Berthe Morisot, veuve d'Eugène Manet ».