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HISTOIRE

  • Monsieur Legros ou L'art de la coiëffure des Dames Françoises

    On lui doit d'avoir élever la coiffure au rang de l'art ! Cuisinier de métier, Legros de Rumigny (1710-1770) s'installe en qualité de coiffeur à la cour du roi de France en 1757. Il a l’insigne privilège d'être au service des deux favorites en titre, Madame de Pompadour (1721-1764), puis Madame du Barry (1743-793). Pourtant, de lui, l'histoire ne retiendra que son nom et oubliera son prénom.

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    Cinq ans après avoir exposé à la foire de Sainte-Ovide, Place Vendôme, une trentaine de poupées coiffées chacune d'une manière différente, il publie en 1765 un ouvrage qu'il intitule « L'art de la coiëffure des Dames Françoises, avec des estampes, et ou sont représentées les têtes coeffées » et où il immortalise ses plus belles créations. Puis l'époque va s'ouvrir aux extravagances. Les coiffures vont devenir de plus en plus hautes. Censées allonger l'ovale du visage, celui-ci se retrouve parfois situé au milieu du corps. Pour passer sous les portes, certaines d'entre-elles sont munies d'un système de poulies et de ressorts actionnés par des laquais. Ces différents modèles sont affublés de noms reflétant leur caractère prétendument allégorique comme Les Poufs à la puce, les Toques à la drageonne ou les Levers de la Reine..

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    Trois ans plus tard, en 1768, Legros fonde à Paris une académie de coiffure .Ses élèves sont recrutés dans la domesticité des aristocrates et pendant trois ans, ils apprennent à ses côtés l'art des boucles biaisées, en marron, en colimaçon, en dragonnes,... Leurs modèles sont des « Préteuses de tête », des femmes du peuple rémunérées pour se promener coiffées dans Paris afin de faire admirer son travail.

    Mais le destin réserve un sort tragique à Legros : il va faire partie des 132 morts étouffés rue Royale lors du monstrueux mouvement de foule qui suivi le feu d’artifice donné à Paris le mercredi 30 mai 1770 en l'honneur du mariage du Dauphin (futur Louis XVI) et de Marie-Antoinette.

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    Feu d'artifice tiré le 30 mai 1770, à l'occasion du mariage du futur Louis XVI et de Marie-Antoinette, archiduchesse d’Autriche

    (gravure datant de la fin du XVIIIe siècle)

    Les corps des victimes seront inhumés tout près du lieu de la catastrophe, dans le cimetière de la Ville-L’Evêque, proche de la Madeleine, qui servira également de lieu de repos provisoire au roi et à la reine, après leur exécution, 23 ans plus tard, à l'endroit même où leur vie commune avait débuté sous de bien mauvais auspices.

     

  • De la «dame » de l'Antiquité à notre « Madame » d'aujourd'hui

    Venu du latin « domina », le mot « dame » renvoie à la fois à « la maîtresse de maison, à l'épouse, à l'amie et à la souveraine ». Sous l'Antiquité, la « dame » est celle qui habite «la « domus », c'est-à-dire la maison, qui est mariée au « dominus », le seigneur ou maître. Loin d'être « la femme de », elle est alors littéralement « la dominante ».

    On retrouve cette notion antique dans le vocabulaire médiéval. Par opposition au mot « demoiselle » qui renvoie à une mariée, roturière ou noble non titrée, la « dame » du Moyen Âge est une femme de haute naissance ou de très haut rang qui possède une seigneurie et qui a l'autorité sur des vassaux. L'expression « la dame de ses pensées »  naît au XIIe siècle pour exprimer désigner la maîtresse-femme, celle qui règne sur la maison et domine le cœur de son amant.

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    « La Dame aux pensées » - IVe quart du XVe siècle - Anonyme

    Cependant, à la fin du Moyen âge, le statut de la dame va se dégrader dans sa réalité comme dans sa représentation. Une littérature antiféministe se développe avec « Le Roman de la Rose » repris par Jean de Meug, poète français du XIIIe siècle, « Le Miroir de Mariage » d'Eustache Deschamps (1340-1404), « Les Lamentations de Matheolus » de Jean Le Fèvre (1395-1468) et « Les Quinze Joies du Mariage », un texte satirique français en prose publié anonymement au milieu du XVe siècle qui présente un tableau des querelles et tromperies conjugales.

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    Des ouvrages qui avancent les mêmes arguments sexistes et la misogynes : par son origine (née de la côte de l'homme, coupable du péché originel) et sa nature (médisante, luxurieuse et menteuse), la femme est un être amoral qui ne cherche qu'assouvir ses bas instincts. À travers ses clichés, c'est aussi une réalité sociale qui apparaît, celle des femmes battues, abandonnées par leur conjoint, la bigamie et l'adultère...

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    Mesdames de France, filles de Louis XV, sous les traits des 4 éléments (Jean-Marc Nattier)

     

    A partir du XVIIe siècle, « Madame » est le titre des filles du roi de France et du Dauphin et celui de la femme de Monsieur, frère du roi.

    C'est sous cette forme possessive, « Ma-dame » que le terme va entrer définitivement dans le corps social. Depuis 2012, le titre de civilité de « Madame » est donné à toutes les femmes et non plus seulement aux femmes mariées, veuves ou divorcées.

     

     

    Biblio. « Le Moyen Âge au féminin » - Historia Spécial – Mai-Juin 2014.

  • Le "dispositif secret" de Vauban...

    La dictée de ses dernières volontés, parfois sur son lit de mort, ou la rédaction autographe d'un testament ou de codicilles se prête à la mise en ordre des affaires de toute une vie. Sous l'Ancien régime, où la filiation juridique et le droit à la succession n'était créé que par le mariage ou éventuellement l'adoption, c'était souvent l'occasion de révéler l'existence d'enfants naturels...

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    Testament olographe de Vauban daté du 23 mars 1702

    Tel fut le cas du « dispositif secret » de Vauban (1633-1707), Maréchal de France. Un document rédigé le 23 mars 1702 dans lequel il reconnaît cinq enfants naturels conçus au cours de ses nombreux voyages dans les provinces du Royaume.

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    Sébastien Le Prestre, marquis de Vauban - Tableau attribué à une école de peinture du XVIIIe siècle

    Durant toute sa vie, Vauban a tant multiplié les aventures féminines qu'il pouvait difficilement contredire les femmes qui assuraient avoir eu un enfant de lui. C'est pourquoi, par ce codicille, il demandait au sieur Friand, son fidèle secrétaire, de rechercher après sa mort les femmes qui pourraient prétendre avoir été engrossées par lui afin de leur donner deux mille livres à chacune, "sauf s'il se trouve que quelqu'un de ces enfants soient morts", auquel cas "il ne sera pas obligé de faire gratifications aux mères", car, avait-il pris soin de préciser, "je les ai assez bien payées pour n'avoir pas de scrupule à leur égard".

    Et, pour aider le sieur Friand, il citait l'identité de cinq de ses femmes :
    — Mlle Baltasar, une jeune veuve de Bergues, "avec qui [il] a eu très peu de commerce et qui, cependant, prétend avoir un enfant de [lui], ce qu'elle lui a affirmé avec de grands serments";
    — Mlle Poussin, de Paris, "avec qui il a eu commerce seize ou dix-sept ans avant [la rédaction du testament], et très rarement ; elle prétend avoir eu un garçon de [lui], pour lequel elle [l'] importune souvent » ; ;
    — Mme de la Motte, fille, à ce qu’elle dit, d'un comte de Burquoy "bien qu'[il] doute fort de la vérité de ses serments les plus forts" selon lesquels elle a eu un enfant de lui; "le hasard a voulu qu' [il] ait eu commerce avec elle... et il ne laisse pas de penser que ce pourrait être véritable";
    — Mlle Baussant, de Paris également, "qui se prétend être grosse de [son] fait";
    — "Une pauvre dame irlandaise nommée Madame Dietrich"; bien qu'il y ait lieu de douter qu'elle ait eu un enfant de lui, il ne veut pas hasarder "le salut de [son] âme" pour cela.

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    La marquise de Montespan et ses enfants par Pierre Mignard

    Une démarche honorable mais surprenante de la part d'un homme qui s'était indigné de la légitimation par le roi Louis XIV (1638-1715) de deux enfants naturels fruits de sa liaison avec Madame de Montespan (1640-1707), les Duc de Maine (1670-1736) et le Comte de Toulouse (1678-1737). Un acte qu'il jugeait en totale violation avec le principe d'indisponibilité inhérent au statut de la Couronne de France. Vauban reprochait en outre au roi de rendre ostensiblement publiques des affaires qui auraient dû rester cachées car peu avouables : "C'est à proprement parler couronner le vice et en faire parade que de donner tant d'éclat à des naissances que la religion et la bienséance voudraient qu'on tînt cachées".