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HISTOIRES GOURMANDES

  • L'histoire du poulet Marengo

    14 juin 1800 (25 Prairial an VIII) en Italie. A cinquante kilomètres au nord de Gènes, dans la plaine de Marengo, un petit village du Piémont. Les troupes de l'armée française du Général Bonaparte alors Premier Consul composées de 28 000 hommes font face aux 30 000 soldats de l'armée impériale autrichienne, lesquels ont d'abord l'avantage avant que les renforts français n'arrivent et renversent la situation in extremis. A la nuit tombée, le Piémont retentit des cris d'allégresse des soldats vainqueurs !

    Le Premier Consul qui n'a rien avalé de la journée a une faim de loup ! Il réclame du poulet, son plat préféré ! Son cuisinier, François Claude Guignet dit Dunand qui, avant d'être à son service, a servi les princes de Condé et suivi le duc de Bourbon en émigration durant douze années, doit trouver rapidement de quoi le nourrir. Et ce n'est pas une mince affaire !

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    La bataille de Marengo par Louis-François Lejeune

    Car une fois encore, le ravitaillement n'a pas suivi ! Ni vivres à sa disposition, ni ustensiles de cuisine ! Dunand le sait, il va devoir faire encore une fois « à la fortune du pot » avec ce que ses aides vont réussir à grappiller ça et là dans les campagnes environnantes...

    A leur retour, le cuisinier examine le précieux butin : un poulet rendu sourd ou fou par le bruit des canons, des œufs, quelques légumes de jardin miraculeusement épargnés, des oignons, des tomates, de l'ail et du persil, un reste de pain rassis, un litron de vin blanc dérobé chez un aubergiste et des écrevisses pêchées dans les marais … Sans oublier une poêle à frire !

    Dunand découpe la volaille au sabre, la place dans la poêle et la fait rissoler à l'huile d'olive avant de la recouvrir de tomates et de vin blanc et de laisser réduire le tout. Dans la même huile, il fait frire successivement le pain, les œufs et les écrevisses. Enfin, il sert les croûtons de pain surmontés des œufs et des écrevisses en ronde, autour des morceaux de poulet, sur un lit de sauce à la tomate et aux oignons.

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    Ce « poulet de la victoire » prendra le nom de « Poulet Marengo » et fera carrière dans les restaurants parisiens. Dunand restera fidèle à l'Empereur jusqu'à son exil sur l'île de Sainte-Hélène : «  Je travaillais de tous mes moyens à la conservation de la santé du grand homme sur lequel reposaient les destinées de la France » confessera t'il. Originaire de Suisse, il avouera aussi s'être inspiré pour sa recette d'un mets du Jura : le poulet aux écrevisses.

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    Le général Bonaparte et son chef d'état-major le général Berthier à la bataille de Marengo par J. Boze, R. Lefevre et C. Vernet

     

    Belle histoire que cette recette n'est-ce-pas, même si sa véracité est aujourd'hui contestée par plusieurs historiens... Ce qui est vrai, par contre, c'est que la bataille de Marengo a fait près de 15 000 morts et blessés et pas moins de 8 000 prisonniers autrichiens.

  • La mimolette, un fromage de guerre

    Dire que le très catholique roi de France Louis XIV (1638-1715) n'aimait pas les hollandais est un doux euphémisme ! Il les haïssait ! Car ses motifs de mécontentement contre ces « Provinces-Unies », bastion du protestantisme, étaient nombreux ! Alors, en 1672, il leur déclare la guerre.

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    Et pour commencer, il demande à Colbert (1619-1683) d'interdire l'importation de leurs fromages et notamment de l'Édam. Ce fromage porte le nom d'une ville de la province de Hollande-Septentrionale, une très ancienne région d'élevage. Facilement transportable, nutritif, l'Édam est très utile pour le ravitaillement des navires comme des soldats.

    Aussi, le ministre du Roi Soleil va exhorter les éleveurs français à fabriquer un fromage similaire.

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    Louis XIV au siège de Maastricht en 1673

    C'est ainsi que naît en Flandre française, dans la région de Lille, un fromage au lait cru de vache, à pâte pressée non cuite, la « boule de Lille » ou « vieux hollande », qui se différencie de l'Edam en raison d'une part de l'ajout d'un colorant orange, le rocou, issu de la graine du roucouyer, un fruit d’Amérique centrale et d'autre part de l'absence de croûte paraffinée.

    Ce n'est au XXe siècle que ce fromage prend son nom actuel de « mimolette »  nom dérivé de « mollet » en référence à sa pâte mi-molle, mi-dure, laquelle, avec le temps, devient de plus en plus cassante. Quant à sa coloration orangée, elle n'est plus due au rocou mais seulement au carotène.

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    Souvent présentée comme le fromage préféré du général de Gaulle (1890-1970), la mimolette se déguste aussi bien crue, fondue que râpée, en accompagnement d'aliments salés ou sucrés, et s'adapte aux préparations les plus simples comme les plus sophistiquées.

    Aujourd'hui, la production de la Mimolette s’est industrialisée et est mise en œuvre dans la Meuse et chez nous en Normandie, principalement dans le département du Calvados.

     

  • Le café, l'obsession balzacienne

    « Je suis un type dans le genre de Balzac. Je bois énormément de café. »

    Alphonse Allais

    Le café : c'était l'obsession d'Honoré de Balzac (1799-1851), « son ambroisie, son Hippocrène, sa Ciguë ». L'huile de moteur de sa très grande ambition. Ne voulait-il pas accomplir par la plume ce que Napoléon avait accompli par l'épée ?

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    Honoré de Balzac (1799-1851)

    Ce maître du roman français découvre les bienfaits du café à 'l'âge de vingt ans. Il va dès lors en consommer sans modération car sans lui il ne peut créer. Le café est son « inspirateur ». Il améliore sa concentration, facilite l'apparition de nouvelles idées et surtout surtout l'aide à rester éveillé.

    Car le quotidien de ce travailleur forcené est minutieusement réglé : « Je me couche à 6 h du soir ou à 7 h comme les poules ; on me réveille à 1 h du matin et je travaille jusqu'à 8 h. A 8 h je dors encore une heure et demie puis je prends quelque chose de peu substantiel, une tasse de café pur, et je m'attelle à mon fiacre jusqu'à 4 h. Je reçois, je prends un bain ou je sors, et après dîner, je me couche. »

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    Alors, le café lui permet de tenir le coup. La légende raconte qu'il en aurait bu jusqu'à cinquante par jour ! C'est très exagéré car cette dose serait létale et Balzac n'était pas suicidaire ! En vérité, ce serait plutôt entre dix-sept et vingt cinq tasses par jour et surtout par nuit. Car c'est la nuit qu'il « prend son torrent de café », une tasse toutes les dix-sept minutes, une consommation frénétique qui entraîne une réelle dépendance : il est caféinomane.

    En connaisseur éclairé, il n'hésite pas à sillonner la capitale à la recherche du « bon » café. Trois variétés ont sa préférence : Bourdon, Martinique et Moka. Il le prépare lui-même, chez lui, le faisant bouillir pendant des heures avant de le déguster sans sucre, sans lait et très serré pour faire le plein de dopamine et d'adrénaline. Alors seulement, il peut écrire, jusqu'à seize heures d'affilée, noircissant en moyenne seize pages par jour.

    café,honoré de balzac,amateur de café

    La précieuse cafetière de Balzac sur sa table de travail

    Un rythme qui va finir par lui être fatal. « L'abus de café m'éteint de jour en jour » écrit-il dès 1843, conscient qu'il fragilise par ses excès une santé déjà précaire et qui va continuer à se dégrader. Le 18 août 1850, lors de son ultime visite, Victor Hugo (1802-1885) le trouve « la face violette, presque noire. » Honoré de Balzac succombera quelques heures plus tard à une crise cardiaque. Il n'avait que 52 ans. L'ambroisie était bien devenue sa cigüe. »

     

     

    Biblio. « Petites manies et lubies des grands personnages de l'histoire » de Ch. Chaulin – Larousse, 2023.