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PASSION GENEALOGIE, HISTOIRES de NORMANDIE et d'AILLEURS - Page 3

  • Le café, l'obsession balzacienne

    « Je suis un type dans le genre de Balzac. Je bois énormément de café. »

    Alphonse Allais

    Le café : c'était l'obsession d'Honoré de Balzac (1799-1851), « son ambroisie, son Hippocrène, sa Ciguë ». L'huile de moteur de sa très grande ambition. Ne voulait-il pas accomplir par la plume ce que Napoléon avait accompli par l'épée ?

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    Honoré de Balzac (1799-1851)

    Ce maître du roman français découvre les bienfaits du café à 'l'âge de vingt ans. Il va dès lors en consommer sans modération car sans lui il ne peut créer. Le café est son « inspirateur ». Il améliore sa concentration, facilite l'apparition de nouvelles idées et surtout surtout l'aide à rester éveillé.

    Car le quotidien de ce travailleur forcené est minutieusement réglé : « Je me couche à 6 h du soir ou à 7 h comme les poules ; on me réveille à 1 h du matin et je travaille jusqu'à 8 h. A 8 h je dors encore une heure et demie puis je prends quelque chose de peu substantiel, une tasse de café pur, et je m'attelle à mon fiacre jusqu'à 4 h. Je reçois, je prends un bain ou je sors, et après dîner, je me couche. »

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    Alors, le café lui permet de tenir le coup. La légende raconte qu'il en aurait bu jusqu'à cinquante par jour ! C'est très exagéré car cette dose serait létale et Balzac n'était pas suicidaire ! En vérité, ce serait plutôt entre dix-sept et vingt cinq tasses par jour et surtout par nuit. Car c'est la nuit qu'il « prend son torrent de café », une tasse toutes les dix-sept minutes, une consommation frénétique qui entraîne une réelle dépendance : il est caféinomane.

    En connaisseur éclairé, il n'hésite pas à sillonner la capitale à la recherche du « bon » café. Trois variétés ont sa préférence : Bourdon, Martinique et Moka. Il le prépare lui-même, chez lui, le faisant bouillir pendant des heures avant de le déguster sans sucre, sans lait et très serré pour faire le plein de dopamine et d'adrénaline. Alors seulement, il peut écrire, jusqu'à seize heures d'affilée, noircissant en moyenne seize pages par jour.

    café,honoré de balzac,amateur de café

    La précieuse cafetière de Balzac sur sa table de travail

    Un rythme qui va finir par lui être fatal. « L'abus de café m'éteint de jour en jour » écrit-il dès 1843, conscient qu'il fragilise par ses excès une santé déjà précaire et qui va continuer à se dégrader. Le 18 août 1850, lors de son ultime visite, Victor Hugo (1802-1885) le trouve « la face violette, presque noire. » Honoré de Balzac succombera quelques heures plus tard à une crise cardiaque. Il n'avait que 52 ans. L'ambroisie était bien devenue sa cigüe. »

     

     

    Biblio. « Petites manies et lubies des grands personnages de l'histoire » de Ch. Chaulin – Larousse, 2023.

  • Tragique destin que celui de "La Petite Irène" !...

    Ce portrait d'elle à l'âge de 8 ans, elle l'a détesté dès qu'elle l'a vu. Comment expliquer cette aversion qui ne l'a quittera jamais ? Inconsciemment, savait-elle qu'il allait ruiner sa vie ?

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    " La Petite Irène" d'Auguste Renoir -1880

    En cette fin du XVIIIe siècle, pour subsister dans la capitale, le peintre Auguste Renoir (1841-1919), en pleine misère, loue ses services aux riches Bourgeois parisiens. Le financier et grand investisseur à la Bourse de Paris, Louis de Cahen (1837-1922), l'un des hommes les plus fortunés de son temps, lui commande le portrait de chacune de ses trois filles, Irène (1872-1963), Élisabeth (1874-1944) et Alice (1876-1965).

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    Acte de naissance d'Irène de Cahen le 20 septembre 1872 au Château de la Jonchère à Bougival

    Pour réaliser le portrait de l'aînée, une huile sur toile de 64 cm sur 54, Renoir se rend à l'hôtel particulier de l'homme d'affaires, au numéro 2 de la rue Bassano. Deux séances de travail vont lui être nécessaires pour réaliser sa toile appelée "Portrait d'Irène Cahen d’Anvers", "Portrait de Mademoiselle Irène Cahen d'Anvers", "La Petite Fille au ruban bleu ou bien encore et plus simplement "La Petite Irène".

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    Auguste Renoir - Autoportrait

    Lors de la réception du portrait par la famille, il déplut tout de suite tant au père qui rechigna à verser à son auteur les 1500 francs (environ 5000 euros) qu'il lui devait, qu'à la jeune intéressée qui fit savoir au peintre qu'elle n'appréciait pas la représentation trop sage qu'il avait fait d'elle.

    Alors, on s'empressa d'oublier cette toile dans quelque coin de la demeure familiale... Et Irène grandit.

    Le 8 octobre 1891, elle épouse le comte italien Moïse de Camondo (1860-1935) dont elle aura deux enfants et dont elle divorcera en 1902 pour, après s'être convertie au catholicisme, épouser le 2 mars 1903 comte Charles Sampieri (1863-1930).

    Les années passent et, le 5 septembre 1917, la Première Guerre Mondiale lui enlève son fils aîné âgé de 25 ans, tué au combat. Deux ans plus tard, sa fille Béatrice (1894-1945) épouse un artiste-compositeur classique, Léon Reinach (1893-1944). Le couple aura deux enfants.

    Les années passent encore. Nous sommes maintenant en 1941. L'occupant nazi spolie les biens juifs. "La Petite Irène", dont la valeur entre temps est devenue inestimable, tombe dans les mains de Goering (1893-1946) qui la cède à Emil Georg Bührle (1890-1956), un industriel suisse d'origine allemande, fabricant d'armes lourdes pour la Wermacht mais aussi collectionneur d’œuvres d'art peu scrupuleux sur leurs origines. Le gendre d'Irène, Léon Reinach (1893-1944) tente vainement de s'y opposer. Un geste qui lui sera fatal ainsi qu'à sa femme et à leurs deux enfants : tous périront en déportation à Auschwitz.

    En 1946, Irène repère dans l'exposition parisienne intitulée "Chefs-d'œuvre des collections françaises retrouvées en Allemagne "le portrait que Renoir avait fait d'elle autrefois. Elle demande et obtient sa restitution. Mais elle supporte encore moins qu'avant cette toile à l'origine de la disparition de sa fille. Elle décide donc de s'en séparer et la met en vente. C'est alors qu'elle est achetée par le même Emil Georg Bührle. Voilà comment "La Petite Irène", considéré aujourd'hui comme un pur chef-d’œuvre, reprend, en toute légalité cette fois, le chemin de la Suisse. Le tableau appartient encore aujourd'hui à la Fondation Bührle de Zurich.

     

     

  • La langue de Molière

    Comme l'espagnol est celle de Cervantès, l'allemand celle de Goethe, l'anglais celle de Shakespeare et l'italien celle de Dante, le français est dite « langue de Molière ». Ce dramaturge et acteur de théâtre qui a peint les vices de ses contemporains et les plaies de la société de son temps, le créateur d'Harpagon, de Tartuffe, ou de Don Juan, qui a séjourné à Rouen en 1643 puis, avec sa troupe de comédiens, en 1658*, ce contemporain et rival de notre grand Corneille (1606-1684), comment Molière (1622-1673) est-il devenu l'ambassadeur de notre langue ? Voilà l'histoire...

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    Molière (1622-1673) 

    En fait, tout s'est décidé au XIXe siècle, époque où, en France, Molière devient l'écrivain national « parce que son théâtre est la synthèse réussie de tous les registres, des parlers les plus populaires, paysans, patois régionaux aux discours rhétoriques en vers et à la langue de la Cour. Son œuvre est le conservatoire de toutes les langues des Français » explique Martial Poirson, professeur des université et spécialiste d'histoire, de littérature, d'études théâtrales et d'économie de la culture, auteur de « Molière, la fabrique d'une gloire nationale »** La construction du mythe avait cependant commencé dès le siècle précédent avec le Molière « réinventé » par les penseurs des Lumières : archétype du classicisme, porteur d'un certain usage de la langue sur tout le territoire national et au-delà des frontières, ambassadeur de la politique de rayonnement culturel du roi Louis XIV (1638-1715).

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    Mais c'est vraiment à la fin du XIXe siècle avec l'instauration de l'école publique, gratuite et obligatoire que Molière prend la dimension d'auteur phare des programmes scolaires qu'on lui connaît aujourd'hui. «  A l'époque, l'un des exercices types est le pastiche écrit à la façon de Molière. Cela s'inscrit dans un projet de promotion du français académique dans les régions où les patois sont encore très parlés et dans les colonies, où se prolonge le projet d’inculcation de langue française » poursuit Martial Poirson. Lire Molière, c’est acquérir un lexique et une syntaxe d’une richesse propre au XVIIe siècle !

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    Il est aujourd'hui l'auteur francophone le plus lu, le plus joué et le plus traduit dans le monde ! Il est aux yeux de nombre d'étrangers la culture française personnifiée. Un comble pour celui qui, parce qu'il était comédien, n'a jamais pu avoir les honneurs de l'Académie française !...

     

    * Une plaque commémorative à l’emplacement de l’ancien jeu de paume des Bracques, rue St. Eloi, où Molière et sa troupe jouèrent de mars à octobre 1658, rappelle son passage.

    **Ed. du Seuil, 2022.

    Biblio. « Ça m'intéresse » n°38 – Avril-Juin 2022