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HISTOIRES GOURMANDES - Page 4

  • Et que ça saute !

    Il pleut et les enfants s'ennuient... Et si vous leur faisiez des crêpes ? Simplement de la farine, du lait, du sel et des œufs. Sucrée ou salée, légère ou gourmande, la crêpe est facile à réaliser, s'adapte à toutes les garnitures et plaît aux petits comme aux grands.

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    Les historiens établissent son origine à 7000 an avant Jésus Christ. A cette époque, d'après-eux, il s’agissait d’une galette assez épaisse, réalisée avec une pâte mêlant de l’eau et diverses céréales écrasées. Une pierre plate, bien chaude, permettra par la suite sa cuisson.

    Plus près de nous, on trouve la plus vieille recette répertoriée de crêpe dans « Le Ménagier de Paris » de 1390  :

    « Prenez de la fleur et destrempez d’œufs tant moyeux comme aubuns, osté le germe, et le deffaites d'eaue, et y mettez du sel et du vin, et batez longuement ensemble : puis mettez du sain sur le feu en une petite paelle de fer, ou moitié sain ou moitié beurre frais, et faites fremier ; et adonc aiez une escuelle percée d'un pertuis gros comme vostre petit doit, et adonc mettez de celle boulie dedans l'escuelle en commençant au milieu et laissiez filer tout autour de la paelle ; puis mettez en un plat, et de la poudre de sucre dessus. »

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    Miniature du Ménagier de Paris.

    La plus célèbre des crêpes est certainement la crêpe Suzette qui doit son nom à Suzanne Reichenberg (1853-1924), actrice de la Comédie-Française. Dessert traditionnel fait d'une crêpe accompagnée d’une sauce au beurre, au sucre caramélisé, au jus d'orange ou de mandarine, avec des zestes d’agrume et de l’alcool, en général du Grand Marnier.

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    Suzanne Reichenberg (1853-1924)

    Quant à la plus fine, la crêpe dentelle, c'est une spécialité bretonne qui, comme souvent en cuisine, est née d'une maladresse de cuisinière. Une quimpéroise, Marie Catherine Cornic (1857-1917) aurait oublié sa crêpe fine sur le billig, la plaque en fonte sur laquelle on la fait cuire. Elle la plie délicatement en huit et de la met de côté. Un peut plus tard, elle s’aperçoit que le beurre et le sucre dont elle l’avait nappée ont doucement caramélisé et l’ont rendue, en refroidissant, croustillante à souhait.

    Allez, on s'y met !  Et bonne dégustation !

  • La soupe à la Reine

    "Marcher sur des œufs", "mettre tous ses œufs dans la même panier", "qui vole un œuf vole un bœuf", "tuer dans l’œuf"...  Les adages autour de la célèbre coquille ne manquent pas ! Ne doit-on pas à Jean de la Fontaine l'un des plus célèbres : « tuer la poule aux œufs d'or  »  ?

    L'Avarice perd tout en voulant tout gagner.
    Je ne veux pour le témoigner
    Que celui dont la Poule, à ce que dit la fable,
    Pondait tous les jours un œuf d'or.
    Il crut que dans son corps elle avait un trésor.
    Il la tua, l'ouvrit, et la trouva semblable
    A celles dont les œufs ne lui rapportaient rien,
    S'étant lui-même ôté le plus beau de son bien.
    Belle leçon pour les gens chiches :
    Pendant ces derniers temps, combien en a-t-on vus
    Qui du soir au matin sont pauvres devenus
    Pour vouloir trop tôt être riches ?

    Ce qu'on sait moins en parlant des œufs, c'est que Napoléon disait leur devoir tout bonnement son salut gastrique ! Sujet à d'horribles constipations depuis l'enfance, le médecin en charge de sa santé sur l’Île de Sainte-Hélène, avait recueilli dans ses mémoires, les confidences de l'Empereur sur ce sujet. « Je suis parfois obligé, lui avait-il confié, d'y joindre les boissons douces, le bouillon aux herbes, la diète. Souvent même, tout ce régime ne suffit pas ; je suis forcé de recourir à mon remède héroïque, à la soupe à la reine : cette composition de lait, de jaune d’œuf et de sucre, produit sur moi l'effet d'un purgatif doux et me soulage. »

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    La recette du potage à la Reine date vraisemblablement du XVe siècle et rendrait hommage à Marguerite de Valois (1553-1615), première épouse d'Henri IV t(1553-1610). S'il était servi à cette époque à la table de la Cour une fois par semaine, le jeudi, il rentrait également dans les menus des dispensaires car ses ingrédients en faisaient un remède particulièrement fortifiant.

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    Portrait de Marguerite de France vers 1574

    Sa délicatesse mais surtout son « modus operandi » justifiaient que son élaboration soit confiée à un pharmacien. Dans son « livre de cuisine » (Larousse, 1927), Madame Saint-Ange en a dévoilé la recette : au résumé, une purée de volaille, à laquelle du riz cuit et passé en même temps que celle-ci, apporte la cohésion nécessaire. En ancienne cuisine, on employait à la place du riz de la mie de pain trempée dans du bouillon.

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    Mise à point finale avec des jaunes d’œufs, de la crème et une proportion assez notable de beurre. Si la préparation de ce potage n'offre au demeurant aucune difficulté, l'emploi d'un mortier était indispensable !

     

    Biblio. « Revue d'histoire de la pharmacie » n°134 de 1952 et « L'Histoire à table » d'A. Castelot, Plon, 1972.

  • Et badadi et badadoit...

    Auguste Badoit (1796-1858) est un ligérien représentant en soierie qui, constatant le fort engouement que suscite le thermalisme, décide de se lancer à 36 ans dans l’exploitation des eaux de Saint-Galmier réputées pour leurs vertus médicinales et jusqu’alors uniquement consommées sur place par les curistes.

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    Buste d'Auguste Badoit - Office de tourisme de Saint-Galmier

    Bien que connue depuis l'Antiquité, la notoriété de cette pétillante eau auvergnate s'est enflammée en 1778, quand le médecin honoraire du roi Louis XVI (1754-1793) en personne, Marin Richard de Laprade (1744-1797) en fait l'éloge, la qualifiant d’ «d'eau apéritive et exhilarante », autrement dit qui stimule l’humeur et l’esprit, allant même jusqu'à la comparer au Champagne. C'est ainsi qu'au fil des ans, prendre les eaux devient tendance.

    En 1837, Auguste Badoit, en homme avisé, cherche des commanditaires et signe un bail à ferme avec la ville de Saint-Galmier (Loire) pour l’exploitation de l'une des sources, celle de la Fontfort située au-dessus de la plaine du Forez. Très vite ensuite, pour neutraliser la concurrence, il achètera les sources voisines qui porteront toutes désormais son nom.

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    Entrepreneur habile et précurseur, il comprend que, pour exister face aux grandes stations de thermalisme que sont celles notamment Vichy et Évian, son eau doit marquer sa différence. Il a alors cette idée originale du « thermalisme à domicile » : l'eau de Badoit sera la première eau minérale naturelle commercialisée en bouteilles ! Et il va dès lors s'employer à la commercialiser de plus en plus loin : d’abord dans les petits commerces locaux, principalement les pharmacies mais aussi certaines petites épiceries, puis dans la région lyonnaise et enfin jusqu’à Paris, Marseille et Nice et quelques grandes villes européennes.  Et ça marche ! A sa mort en 1858, on estime à 1,5 million le nombre de bouteilles écoulées par an, un chiffre exceptionnel pour l’époque. Un siècle plus tard, en 1958, la production annuelle atteint les 37 millions de bouteilles.  Un succès qui doit aussi beaucoup aux nombreuses campagnes publicitaires initiées dès 1842 et reprises ensuite avec succès par ses successeurs !

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    L'eau de Badoit a été reconnue d'utilité publique par l'Académie de médecine en 1897. A partir des années 1950, elle quittera définitivement les pharmacies pour être commercialisée dans les grandes surfaces.

    P.S. L'étymologie du patronyme « badoit» serait issu de l'ancien français « badois » signifiant « niais ». Bien loin de l'être Monsieur Badoit !

     

     

     

    Biblio. « Made in France » - France-Loisirs, 2011.