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NOTRE BELLE NORMANDIE - Page 2

  • Une salamandre sur le blason de la ville du Havre

    On la retrouve partout où le roi François Ier (1494-1547) a laissé sa trace, généralement couchée sur un lit de flammes. Dans toutes les résidences royales, aux châteaux de Blois, de Chambord, de Fontainebleau, et.... sur le blason de la Ville du Havre !

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    Salamandre royale avec sa devise au château d’Azay-le-Rideau

    La salamandre, c' est un petit amphibien totalement inoffensif. Sorte de petit lézard long d'une douzaine de centimètres, de couleur noir tacheté de jaune-orangé, en cas d'attaque, elle se défend en sécrétant un venin toxique à partir de glandes situées à l'arrière du cou, un poison puissant capable de tuer un chien.

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    Objet à la fois de peur et de légendes, on lui prête depuis les temps les plus reculés l'étrange capacité de survivre dans les flammes ce qui la rend à la fois invulnérable et diabolique. Cette croyance a pour origine le fait qu'elle hiberne souvent accrochée à des souches d’arbres. L'hiver, lorsqu’on prenait ces souches pour les brûler, on pouvait la voir s’échapper bien vivante des flamme, protégée par sa peau humide pendant le temps nécessaire pour se réveiller et s’enfuir !

    La salamandre va redorer son blason à la Renaissance, grâce à François Ier ou plus sûrement à sa mère, la reine Louise de Savoie (1476-1531). En effet, le roi n'a qu'une dizaine d'années et « n'est » encore que le Duc d’Angoulême quand, vers 1504, il va étrangement choisir comme emblème la salamandre « maîtresse des éléments », symbole de résistance, d'immortalité, de force, de justice, de sagesse et de tempérance, qui naît dans l'eau, vit sur terre et maîtrise le feu, et décider qu'il ornera désormais les armoiries des Valois.

    L'animal mythique est alors accompagné de cette maxime « Notrisco al buono stingo el reo » ce que l'on peut traduire par « je me nourris du bon (feu) et j'éteins le mauvais », illustrant sans doute que la foi chrétienne (le bon feu) pouvait éteindre les flammes de l’Enfer (le mauvais feu) et que la vertu ne se laisse pas consumer par le feu de la cupidité et de la luxure.

    Au fil du temps, la formule évolue en « Nustrico et extinguo » ( (Je m'en nourris et je l'éteins ). Cette là encore aujourd'hui la devise de la ville du Havre, laquelle a été fondée par François Ier en 1517.

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    A noter que la salamandre n’est pas le seul animal à figurer sur le blason de la ville normande. En 1926, on y ajoute le lion en remplacement de l'une des trois fleurs de lys que comportait le blason à l’origine en hommage au roi Albert Ier de Belgique (1875-1934) qui séjourna dans la ville pendant la première guerre mondiale.

  • La Muette, curieux nom pour une forêt...

    Morcelée sur 13 communes* des hauteurs de Rouen, la forêt de la Muette abrite aujourd'hui sur ses 900 hectares des chênes, des châtaigniers, des hêtres, des érables, des merisiers et des épicéas.

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    Son histoire débute en l'an 535. A l'époque mérovingienne, d'une façon générale, la forêt appartient à tout le monde et les riverains exploitent à leur guise les ressources qu'elle leur offre.

    Vers 1030, le duc Robert le Magnifique (1010-1035), le père de Guillaume le Conquérant (1027/1028-1087) lègue la forêt Silveison ou Forêt Verte aux moines de l'abbaye de St-Ouen de Rouen. La propriété des moines sur la forêt n'est toutefois pas totale. Elle est limitée par l'autorité du duc de Normandie et celle du Roi de France. Et aussi par les droits d'usage des populations riveraines lesquels seront à l'origine des biens communaux : l'affouage (prélever du bois pour se chauffer ou bâtir sa maison), le pâturage et le panage (y mettre à paître son bétail et ses porcs ).

    Et tout va bien se passer tant que le peuplement va demeurer clairsemé. Ce sont les grands défrichements qui vont bouleverser cet équilibre comme celui du XIVe siècle où 200 ha sont mis à nu sur le territoire de la paroisse de Quincampoix pour y installer une muette, c’est à dire une résidence de chasse où est entretenue une meute.

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    Aspect général de l'abbatiale Saint-Ouen -Gravure du XIXe siècle.

    Les conflits entre population et religieux se multipliant, le 2 septembre 1551, à la demande du Roi, il est procédé à une « réformation », c'est-à-dire à un inventaire des peuplements afin de préciser les droits d’usage des paroisses dites « usufruitières ». S'ensuit une sentence judiciaire qui sépare en deux parts égales la Forêt Verte. La première est réservée aux religieux sans droit d’usage et sans droit d’accès. L’autre (889ha), à l'origine de la forêt de la Muette, est attribuée « en toute propriété » aux riverains.

    Durant la Révolution, les biens de la Muette, considérés comme appartenant à l’Église vont être confisqués. Ils ne seront restitués qu'un demi-siècle plus tard, après une multitude de procès.

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    En 1829, les communes reprennent possession des biens de la Muette. La gestion est alors confiée à un syndicat, le Syndicat des Biens Communaux de la Muette, plus ancien syndicat de France reconnu par le Roi Louis Philippe (1773-1850) le 22 mars 1838. La répartition des revenus de l'exploitation de la forêt est effectuée au prorata du nombre d'indigents de chaque commune.

    Aujourd'hui, toujours gérés par le syndicat des biens communaux de la Muette avec l'aide de l'Office National des Forêts (ONF), les revenus proviennent de la vente des bois et des droits de chasse attribués par adjudication. Le syndicat répartit les revenus d'exploitation aux communes concernées. Cette organisation originale, qui apportait une aide aux plus démunis, a traversé les siècle et a permis de conserver un magnifique patrimoine forestier.

     

    * Communes de Bosc-Guérard, Déville-lès-Rouen, Fontaine-sous-Préaux, Le Houlme, Houppeville, Isneauville, Malaunay, Maromme, Notre-Dame de Bondeville, Quincampoix, Saint-André-sur-Cailly, Saint-Georges-sur-Fontaine et La Vieux-Rue.

  • L'Ile Lacroix, paradis des guinguettes rouennaises du XIXe siècle

    Au centre de la capitale normande, les pieds dans la Seine et les berges vertes, elle a l’âme marinière. Dernière île sur le fleuve avant la mer, l'île Lacroix de Rouen (en référence à une croix placée à son extrémité) ne s'est pas toujours appelée comme ça ! Elle a successivement reçu, soit en totalité, soit partiellement, un assez grand nombre de dénominations différentes, dues en partie aux noms de ceux qui l'habitaient ou qui y avaient des propriétés. C'est ainsi qu'on la trouve mentionnée sous les noms d''île de la Mouque, d'île Augustine, d'île Amette, d'île du Valet, d'île Bras-de-Fer, etc...

    Pendant des lustres, l'île rouennaise n'a été qu’un banc de sable régulièrement envahi par les eaux. Longtemps accessible uniquement en barque, tout change avec la visite de l'Empereur Napoléon (1769-1821) en mai 1810. En remplacement de  l'unique et fragile pont provisoire de bateaux en fonction dans la ville depuis 1626,  il décide la construction d'un pont de pierre qui reliera l’île aux deux rives de la ville. Le chantier qui s'ouvre en 1813 va s'étaler sur 16 longues années. En 1829, composé de deux volées de trois arcades enjambant le fleuve, apparaît enfin le Pont de Pierre surnommé le Pont Circonflexe en raison de sa forme, puis successivement appelé Pont d'Angoulême, Pont d'Orléans, et enfin, à partir de 1848, Pont Corneille.  Au-milieu, à la pointe de l'île, un terre-plein est aménagé sur lequel, en 1834, est installée la statue de Pierre Corneille (1606-1684).

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    Dès lors, l'île qui jusque là n'était encore que parsemée de quelques chétives habitations entourées de jardins, va voir arriver plusieurs cafés et restaurants qui vont contribuer rapidement à lui conférer une réputation d’île Festive. En 1848, le tout-Rouen se précipite au «Château Baudet » et au « Tivoli Normand » où se tiennent fêtes et banquets mondains !

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    Trente ans plus tard, en 1878, les « Fantaisies Lyriques », un établissement de spectacle de plus de 1000 places qui sera rebaptisé au début du vingtième siècle « Théâtre des Folies Bergères » accueillent opérettes et spectacles de music-hall. Des « stars » de l'époque comme Félix Mayol, Ouvrard, Mistinguett, Aristide Bruant, Berthe Sylva, Yvette Guilbert, Dranem et Maurice Chevalier s'y produisent. En 1903, son enseigne en forme de lyre, visible des deux rives de la Seine, trône au-dessus des toits. Endommagé pendant la guerre, il rouvrira ses portes en 1952 et pour douze années sous le nom de « Théâtre de la Lyre », un complexe festif en avance sur son temps, doté d’une discothèque, la deuxième du monde après le Whisky à Gogo de Paul Pacini.

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    "La Lyre avant destruction" aquarelle de Tony FRITZ VILLARS (1965)

    Depuis le 27 novembre 2012, l'ancre de la Jeanne d'Arc, croiseur-porte-hélicoptères désarmé en 2010, dont la ville de Rouen était la marraine, a été installée à l'extrémité aval de l'île.

     

    Biblio. "Dictionnaire des rues et places de Rouen" de N. Periaux - Ed. Page de Garde, 1997.