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  • Bizarreries de la langue française

    Le français est une langue pleine de subtilités mais à la grammaire quelquefois surprenante ! Tenez, prenez le nom commun « Aïeul » qu'on emploie fréquemment en généalogie. Étymologiquement, il est issu du latin « avus » signifiant « grand-père », à rapprocher au gothique « avô » pour « grand-mère » et à l'ancien nordique « afi » pour « grand-père ». Il donne en latin populaire le diminutif « aviolus » dont l'accusatif « aviolum » donne « aiol » (XIIIe siècle) qui aboutit à « aïeul » (XVIe siècle).

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    Ce qui est singulier, c'est que ce nom a deux pluriels : « aïeuls » avec un « s » quand il s'agit de désigner nos grands-parents, mais « aieux » avec un « x » quand il s'agit de désigner des ancêtres plus éloignés voire l'ensemble de personnes qui sont à l'origine d'une lignée continue ou appartiennent aux générations anciennes d'une lignée continue.

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    Autre exemple : pourquoi dit-on « grand-mère » et pas « grande-mère » ? Michel Feltin-Palas dans son excellent livre « Cultivons la langue française !* » explique que «du temps de l'ancien français, du IXe siècle au XIIe siècle environ, certains adjectifs ne prenaient pas de « e » au féminin. Comme cependant ils n'étaient pas nombreux, ils ont fini par s'aligner sur la règle majoritaire. L'adjectif « grant », qui s'écrivait alors avec un « t » en faisait partie. La « grant route » est devenue « la grande route » avec un « d ». Ce changement de dernière lettre est conforme à l’étymologie puisque le latin « grandis » prenait un « d » et que ce passage du « t » au « d » a permis d'établir un lien avec les autres mots de la même famille comme le verbe « grandir ».

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    Le « grand » de « grand-mère » a donc fait de la résistance puisque, au féminin, il a conservé sa forme ancienne. De même que de nombreuses villes ont conservé leur « grand-rue » ou leur « grand-place » et qu'on célèbre la « grand-messe » !

    A noter que tous les mots composés avec « grand » prennent désormais un trait d'union et non plus une apostrophe comme jadis mais l'Académie française accepte toutefois « grand'mère », conformément à l'usage ancien.

    Et pour finir, selon les Immortels, il convient d'écrire « des grand-mères » (sans « s » à « grand ») alors que Le Robert préconise « des grands-mères » (avec deux « s) et que le Larousse accepte les deux formes.

     

    * « Cultivons la langue française » de Michel Feltin-Palas, Héliopoles, novembre 2023

  • La mimolette, un fromage de guerre

    Dire que le très catholique roi de France Louis XIV (1638-1715) n'aimait pas les hollandais est un doux euphémisme ! Il les haïssait ! Car ses motifs de mécontentement contre ces « Provinces-Unies », bastion du protestantisme, étaient nombreux ! Alors, en 1672, il leur déclare la guerre.

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    Et pour commencer, il demande à Colbert (1619-1683) d'interdire l'importation de leurs fromages et notamment de l'Édam. Ce fromage porte le nom d'une ville de la province de Hollande-Septentrionale, une très ancienne région d'élevage. Facilement transportable, nutritif, l'Édam est très utile pour le ravitaillement des navires comme des soldats.

    Aussi, le ministre du Roi Soleil va exhorter les éleveurs français à fabriquer un fromage similaire.

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    Louis XIV au siège de Maastricht en 1673

    C'est ainsi que naît en Flandre française, dans la région de Lille, un fromage au lait cru de vache, à pâte pressée non cuite, la « boule de Lille » ou « vieux hollande », qui se différencie de l'Edam en raison d'une part de l'ajout d'un colorant orange, le rocou, issu de la graine du roucouyer, un fruit d’Amérique centrale et d'autre part de l'absence de croûte paraffinée.

    Ce n'est au XXe siècle que ce fromage prend son nom actuel de « mimolette »  nom dérivé de « mollet » en référence à sa pâte mi-molle, mi-dure, laquelle, avec le temps, devient de plus en plus cassante. Quant à sa coloration orangée, elle n'est plus due au rocou mais seulement au carotène.

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    Souvent présentée comme le fromage préféré du général de Gaulle (1890-1970), la mimolette se déguste aussi bien crue, fondue que râpée, en accompagnement d'aliments salés ou sucrés, et s'adapte aux préparations les plus simples comme les plus sophistiquées.

    Aujourd'hui, la production de la Mimolette s’est industrialisée et est mise en œuvre dans la Meuse et chez nous en Normandie, principalement dans le département du Calvados.

     

  • Homard en laisse et Demoiselles de Cherbourg

    21 mars 1841. A Paris, non loin des galeries du Palais-Royal, un homme parfaitement habillé et coiffé promène son animal de compagnie. Rien de très extraordinaire à cela. Ce qui le devient, c'est que cet animal de compagnie tenu en laisse par un joli ruban bleu n'est autre qu' un homard vivant.

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    Cet homme n'est autre que l'écrivain et poète Gérard de Nerval (1808-1855) dont l'état mental présentait déjà des faiblesses. « En quoi, expliquera t'il, un homard est-il plus ridicule qu’un chien, qu’un chat, qu’une gazelle, qu’un lion ou toute autre bête dont on se fait suivre ? J’ai le goût des homards, qui sont tranquilles, sérieux, savent les secrets de la mer , n’aboient pas et n’avalent pas la monade des gens comme les chiens, si antipathiques à Goethe, lequel pourtant n’était pas fou. » Une extravagance qui conduira tout de même notre poète tout droit en maison de santé !

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    La renommée des homards normands remonte au XVIIe siècle. A l'époque, son transport difficile le cantonne à une consommation locale et peu fréquente. C'est seulement dans le courant du XIXe siècle que le homard se fait véritablement connaître comme un produit noble, digne des grandes cuisines. Et c'est presque toujours de Normandie qu'il arrive sur les tables parisiennes ! Deuxième région française de production après la Bretagne, les homards normands sont péchés d'une façon traditionnelle, c'est-à-dire au casier, principalement dans le Cotentin, où les plus petits, préparés en court-bouillon, sont appelés des Demoiselles de Cherbourg.

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    Comme la meilleure saison pour les déguster se situant d'avril à août, pour vous, amis gourmands aux babines alléchées, cette recette traditionnelle normande de Demoiselles de Cherbourg*.

    Prévoir 1 petit homard de 250 grammes par personne, du vin blanc sec, quelques carottes et oignons, un bouquet garni, du poivre en grains, une pointe de Cayenne, Cognac et persil.

    Préparer un court-bouillon avec le vin blanc, carottes, oignons, bouquet garni, poivre en grains et une pointe de Cayenne. Amener à ébullition et laissez cire une vingtaine de minutes. Plongez les homards et laisser cuire 10 à 12 m. Servir avec un peu de jus de cuisson additionné d'un filet de Cognac et d'un peu de persil haché.

    Bon appétit !

     

    * Recette extraite de « Cuisine Normande » de Michel Barberousse – Paris, 1965.