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Trois normands auteurs de romans-feuilletons.

En commun, ces trois-là avaient ce sens de la drôlerie qui plaisait tant à Alphonse Allais (1854-1905). Mais pas que ! Tous trois étaient normands. Tous trois étaient de la même génération. Tous trois étaient porteurs d'un patronyme « coloré » : Leblanc, Le Rouge, Leroux. Tous trois ont fait leurs armes dans le journalisme. Tous trois ont publié leurs premières œuvres dans la presse sous forme de feuilleton.

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 Maurice Leblanc (1864-1941), Gustave Lerouge (1867-1938), Gaston Leroux (1868-1927)

A l'origine, le « feuilleton » est un terme technique utilisé dans le journalisme au XIXe siècle. Il désigne le bas des pages d’un journal, également appelé « rez-de-chaussée ». C’est sous le Consulat (1799-1804) que cette partie du journal prend de l’importance en abritant tout d’abord des critiques, puis des articles de littérature et de science. Les auteurs qui remplissent dès lors ces bas de page sont appelés « feuilletonistes ».

Au début du XIXe siècle, la presse est en difficulté : les grands journaux, à tirage restreint, sont chers et donc se vendent mal. Grâce aux politiques de libéralisation entamées à partir du Second Empire (1851-1870), les choses vont progressivement évoluer. En 1836, Émile de Girardin (1802-1881) révolutionne le marché en lançant un nouveau grand quotidien populaire français qu'il baptise « La Presse » et qui repose sur deux concepts novateurs. Pour réduire les coûts de parution, les pages sont ouvertes aux « annonces », l'équivalent de nos publicités actuelles. Et pour attirer les annonceurs, il introduit le « feuilleton-roman », c'est-à-dire la publication par épisodes d'un roman dans le « feuilleton » du quotidien.

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Et c'est bien vu ! Le public y prend goût et se fidélise. Ainsi, entre 1836 et 1845, la plupart des journaux voient leur tirage doubler. Résultat : les annonceurs, garantis d'un bon retour sur investissement, se multiplient faisant ainsi baisser de moitié le coût de l'abonnement. Rebaptisé « roman-feuilleton », le procédé se généralise. Ayant bien saisi l'effet de fidélisation que leur valent ces publications, les grands journaux de l’époque n'hésitent pas dès lors à faire appel aux plus belles plumes de l'époque comme Honoré de Balzac (1799-1850), Alexandre Dumas (1802-1870) ou George Sand (1804-876). Le premier véritable triomphe du roman français paru en feuilleton, « Les Mystères de Paris » d'Eugène Sue (1804-1857), est publié entre 1841-1843 dans le « Journal des débats ».

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Face à cette élite, arrive une nouvelle génération d'hommes de lettres. Issus bien souvent du journalisme, tous candidats à une carrière littéraire, ils vont faire de la presse leur mode de publication ordinaire et l'utiliser comme instance de légitimation. Cette « bohème médiatique » insuffle un ton plus moderne, plus insolent, plus artiste aussi. D'une part, elle impose un traitement des faits sociaux en liaison avec les modes et les nouvelles pratiques urbaines mais aussi un style neuf mettant au centre de l'écriture l’esprit parisien et la malice.

En 1903, Gaston Leroux publie dans « Le Matin », son premier feuilleton « Le Chercheur de trésors », lequel sera édité l'année suivante sous le titre « La Double Vie de Théophraste Longuet ». La première aventure de Rouletabille, « Le Mystère de la chambre jaune » paraîtra quant à lui en feuilleton dans « L'Illustration » en 1907. La même année, Maurice Leblanc (1864-1941) publie dans le journal « L'Auto » une courte nouvelle intitulée « Un Gentleman », dont le « héros-escroc » n'est autre que la première esquisse de son génial « Arsène Lupin ». Enfin, en 1908, c'est au tour de Gustave Le Rouge (1867-1938) de publier dans la presse quotidienne sous forme de roman-feuilleton son livre « Le Mystérieux Docteur Cornélius », considéré aujourd'hui comme son œuvre principale.

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