29 mars 1923. Cimetière parisien du Père-Lachaise. Division 42. Une impressionnante marée humaine accompagne la grande tragédienne française mais aussi artiste peintre et sculptrice Sarah Bernhardt (1844-1923), « La Divine », qui vient de s'éteindre jusqu'à sa dernière demeure. On n'avait pas vu une telle foule derrière un cortège funèbre depuis l'enterrement du grand Victor Hugo (1802-1885) ! Bien que Chevalier de la Légion d'Honneur depuis janvier 1914, le gouvernement Poincaré lui a refusé des funérailles nationales. A la place, ce sont des milliers de gens qui vont venir lui rendre un dernier hommage !
Obsèques de Sarah Bernhardt [le cortège de fleurs fend la foule] - [photographie de presse] / [Agence Rol]
Star internationale, monstre sacré du théâtre, première tragédienne à jouer sur les cinq continents, ambassadrice de la culture française à l'étranger et notamment aux États-Unis, celle qui a toute sa vie a aimé jouer les provocatrices comme porter les cheveux courts ou oser l'un des premiers liftings de l'histoire, a toute sa vie, en femme libre et engagée qu'elle était, agi selon sa devise : «Quand même !»
En 1915, atteinte d'une tuberculose osseuse à la jambe droite qui se gangrenait, elle est amputée au dessus du genou. Unijambiste, elle refuse canne et jambe de bois et choisit de continuer à jouer tant sur scène que dans les films. Pour cela, elle choisit tout simplement d'apparaître assise.
Dans sa chaise, en 1916, sur le front. Photo Gallica. Bibliothèque nationale de France
Pendant la Grande Guerre, l'administrateur de la Comédie-Française a l'idée de créer un Théâtre aux armées pour divertir les soldats du front auquel vont participer les plus grandes vedettes de l'époque. C'est le cas de celle que Cocteau (1889-1963) a baptisée le « monstre sacré » et Victor Hugo « la Voix d'or ». Ce sont les Poilus qui vont surnommer Sarah Bernhardt « la Mère Lachaise » en référence à la chaise à porteurs qu'elle utilise pour venir jusqu'à eux.
Cette figure majeure du théâtre français du XIX et du début du XXème siècle repose auprès de sa mère dans la modeste tombe qu'elle a dessinée pour elles deux.