« C'est à ma mère que je dois ma fortune
et tout ce que j'ai fait de bien. »
Napoléon
15 août 1769. Ajaccio n'est qu'un petit port de la côte ouest de la Corse, une île depuis peu française pour avoir été vendue au roi Louis XV (1710-1774) par la République de Gènes. Ce jour-là, les habitants qui ont conservé leurs coutumes italiennes célèbrent la fête de Ferragosto, le jour de l'Assomption de Marie.
La toute jeune et très jolie Maria-Letizia Ramolino (1750-1836), l'épouse de Carlo-Maria de Buonaparte (1746-1785) depuis déjà 5 ans, est enceinte de son quatrième enfant.
Malgré une grossesse très avancée, profondément religieuse, elle suit la messe célébrée en l'honneur de la Vierge. Mais à son retour, ressentant les premières douleurs de l'accouchement, elle s'alite. Quelques minutes avant midi, elle donne naissance à un beau garçon qui reçoit le prénom de Napoléone. Une identité que l'intéressé, 27 ans plus tard et devenu Général, choisira de franciser en Napoléon Bonaparte.
Fille d’un simple capitaine de troupes génoises d’Ajaccio, le destin a fait de Letizia Bonaparte la mère d’un Empereur mais aussi de trois Rois et d’une Reine. Peu impressionnée par la réussite de son fils, elle relativisera notamment toute sa vie ses victoires militaires. Elle s'insurgera aussi contre sa décision de se faire couronner empereur en manipulant au passage le pape Pie VII (1742-1823). Un sacrilège insupportable pour cette femme pieuse ! Elle refusera de participer à la cérémonie d'autant qu'il est prévu qu'elle doive s’incliner devant une Joséphine, future impératrice, qu'elle n'apprécie guère ! Napoléon ordonnera cependant au peintre David de la faire figurer sur le tableau du couronnement. Portant un diadème et un voile sur la tête, elle est placée trônant au centre de la loge principale, entourée de ses dames d'honneur et de ses chambellans …
Le sacre de Napoléon par Jacques-Louis David (1805-1807)
Élevée par décret du 23 mars 1805 au rang d'altesse impériale, Létizia finira tout de même par s’habituer à l’empire et à la vie de château qu'il lui offre durant 10 ans. Elle demeurera pourtant toujours sur la réserve. Craignant les lendemains de désenchantement, elle est à l’origine de l’expression « Pourvou qu'ça doure ! » (Pourvu que ça dure ») !
Pour son fils déchu, elle va redevenir une mère aimante, tendre et affectueuse. Elle le suit à l’île d’Elbe et se bat pour lui obtenir de meilleures conditions d’exil lorsqu'il est proscrit à Sainte-Hélène.
Letizia Ramolino Bonaparte « Napoleonis Mater », par Charlotte Bonaparte © Museo Napoleonico, Rome
C'est à Rome qu'elle apprend sa mort le 5 mai 1821. Elle lui survit quinze ans avant qu'infirme et aveugle, elle s'éteigne le 2 février 1836, à l’âge de 85 ans. En 1860, sa dépouille est transférée à la Chapelle impériale d'Ajaccio construite sur ordre de son petit-fils Napoléon III (1808-1873).